Au tout début du mois d’août 2021, alors que les médias portaient leur attention sur la loi bioéthique, un autre texte de référence a été adopté par le parlement et promulgué dans la foulée, visant à renforcer la prévention en santé au travail. Cette loi du 2 août 2021(1) constitue la transposition d’un Accord national interprofessionnel, signé en décembre 2020. La plupart des mesures entreront en application le 31 mars prochain. Il est grand temps pour les dirigeants d’entreprises, responsables des ressources humaines et représentants des salariés de s’y préparer. Et ce, quelle que soit la taille de l’entreprise !
La prévention au cœur de la loi
La lutte contre le harcèlement sexuel
Plusieurs thématiques garnissent cette loi du 2 août 2021, dont celle du harcèlement sexuel. Le texte voté par les parlementaires aligne la définition du Code du travail sur celle du Code pénal, à savoir : « Aucun salarié ne doit subir des faits, soit de harcèlement sexuel constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexistes répétés (…), soit assimilés au harcèlement sexuel consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle (…) ».
Cet alignement des deux Codes illustre la volonté du législateur de mettre l’accent sur l’importance du harcèlement sexuel et des agissements sexistes en entreprise. D’ailleurs, les entreprises de plus de 250 salariés et les CSE (Comité social et économique) quel que soit l’effectif de leur structure ont obligation de désigner un référent HSAS (Harcèlement Sexuel et Agissements sexistes).
Le document d’évaluation des risques s’enrichit
À l’instar du harcèlement sexuel, la loi renforce la prévention en santé au travail qui, pour chaque entreprise se concrétise par le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels – ou DUERP. Les nouvelles mesures applicables au 31 mars en font un outil encore plus central de la démarche de prévention. Le document ne devra plus se « contenter » de répertorier les risques encourus par les salariés, que ceux-ci soient biologiques ou psychosociaux, routiers ou chimiques, etc.
Désormais le DUERP devra intégrer des actions de prévention, formalisées par une liste détaillée et un plan annuel. Les entreprises de plus de 50 salariés devront fournir chaque année les conditions d’exécution desdites actions, une estimation de leur coût, un calendrier de mise en œuvre.
Une évolution majeure porte sur l’obligation faite aux employeurs de conserver leurs documents pendant 40 ans, avec l’ensemble des versions. Une plateforme numérique gouvernementale est annoncée afin que les entreprises puissent stocker leurs DUER de façon dématérialisée, garantissant ainsi une traçabilité.
Des formations en sécurité et en santé au travail
Toujours à propos du DUERP, le texte précise la contribution des représentants du personnel au Comité social et économique (CSE) et/ou en Commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT). Ceux-ci seront d’autant plus aptes à analyser les risques dans leur entreprise qu’ils seront formés de manière plus approfondie pour le faire.
La loi évolue également sur ce sujet : les membres des CSE ou des CSSCT, même ceux appartenant aux entreprises de moins de 300 salariés, devront désormais, suivre une formation initiale en santé et sécurité au travail d’une durée de cinq jours. Une seconde formation (dite « de recyclage ») de 3 jours en CSE et 5 jours en CSSCT complètera la première en cas de renouvellement de mandat.
Pour la prise en charge de ces formations par leur OPCO, les entreprises de moins de 50 salariés doivent nécessairement faire appel à un organisme certifié Qualiopi.
Un passeport pour les travailleurs
Les salariés pourront d’ailleurs les mentionner dans un nouveau document : le Passeport Prévention, qui lui devrait voir le jour un peu plus tard, en octobre 2022. Ce passeport concerne en réalité l’ensemble des travailleurs, y compris ceux qui sont en période de chômage.
Il va répertorier les formations, habilitations et niveaux de compétences en santé et sécurité de chacun.
SST et SPST, quelles différences et quel impact ?
La loi du 2 août 2021 se distingue par un autre changement majeur : les Services de santé au travail (SST) se transforment en Services de prévention et de santé au travail au 31 mars 2022. Les modalités d’organisation de ces SPST ne changent pas, qu’ils soient autonomes – internes à l’entreprise – ou sous forme de service inter-entreprises. En revanche, leurs missions sont étendues et visent à faciliter le décloisonnement entre santé au travail et santé publique.
Une organisation en lien avec la médecine de ville
L’évaluation et la prévention des risques professionnels restent au cœur de la mission des SPST, de même que le suivi médico-professionnel des salariés par le biais du médecin du travail. À ce sujet, le médecin du travail pourra désormais avec l’accord du salarié alimenter leur Dossier médical partagé (DMP), dans un volet dédié et dans le but de garantir un meilleur suivi.
Constituée d’une équipe pluridisciplinaire, le SPST reste en charge de missions de prévention, d’accompagnement et de conseils, par exemple – c’est de rigueur depuis deux ans – sur les conditions de télétravail. La loi du 2 août 2021 insiste sur la notion de pluridisciplinarité, le médecin du travail ayant toujours la possibilité de déléguer une partie de ses missions aux membres de l’équipe qu’il coordonne (Infirmier de santé au travail, Intervenant en Prévention des Risques Professionnels (IPRP) etc… Mais toujours avec l’obligation de passer au moins un tiers de son temps sur le terrain.
Le lien entre médecine de ville et médecine du travail est renforcé, avec le DMP, on l’a dit, mais aussi à terme la contribution des médecins traitants au suivi médical des travailleurs. Dans le sens inverse, une expérimentation devrait être menée, ouvrant la porte sur la prescription d’arrêts de travail et de soins par les médecins de ville pour les médecins du travail.
Des cellules de prévention
Parmi les nouveautés, chaque SPST devra intégrer dans son organisation une cellule de prévention de la désinsertion professionnelle. Celle-ci aura pour mission de conserver, pour chaque travailleur, un « état de santé compatible avec son maintien dans l’emploi ».
Concrètement, il s’agira d’identifier les situations individuelles et de proposer au besoin des mesures d’adaptation, d’aménagement ou de transformation du poste de travail, en considérant, l’âge, ainsi que l’état de santé physique et mental du travailleur concerné.
Sur cette question de l’état de santé des travailleurs, en règle générale, une visite médicale de mi-carrière est prévue dans la loi, sans que ses modalités soient détaillées. Ces dernières doivent être établies par des accords de branches.
Une offre de services claire et certifiée
Tout particulièrement pour les SPST inter-entreprises, un affichage clair des services proposés devra être mis en place et chacun d’entre eux être certifié, c’est-à-dire avoir reçu l’agrément d’un organisme compétent. Cette obligation se double de celle de la clarté sur la tarification pratiquée. Attention, celle-ci évolue…
En effet, les entreprises devront verser, pour les services obligatoires, une cotisation proportionnelle au nombre de salariés chacun valant une unité, quelle que soit son temps de travail. Les services spécifiques ou complémentaires feront quant à eux l’objet d’une grille tarifaire.
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